Le fait religieux dans l'entreprise : A quel "texte" se vouer ?

La question religieuse, bien qu’intemporelle, n’en est pas moins d’actualité. Levons le voile (…) sur les derniers textes, loin d’être d’une simplicité biblique.

Au cœur de ces enjeux, le Ministère du Travail vient de sortir un guide pratique du fait religieux dans les entreprises privées.

Se voulant pragmatique, l’ouvrage prend la forme de près de cinquante questions-réponses sur cinq grands thèmes : le recrutement, l’exécution du travail, le comportement dans l’entreprise, l’organisation du temps de travail, et la vie collective.

A titre d’exemple : «Q. Un(e) ou plusieurs salariés occupent sans autorisation une salle de réunion pour prier. Puis-je leur interdire ?

R. Oui. Les salles de réunion constituent un espace dédié au travail. Si le/les salarié(s) occupent cette salle sans autorisation, quel qu’en soit le motif, vous êtes fondé à leur demander de quitter la pièce. »

Si ce guide est le bienvenu pour les DRH, il n’apporte aucune solution « clés en main », les réponses étant tirées notamment d’une jurisprudence encore incertaine, tentant de concilier le respect d’une liberté fondamentale (la liberté religieuse) et la nécessité de veiller au bon fonctionnement de l’entreprise.

Ce guide préconise avant tout « des attitudes permettant de favoriser la recherche de solutions consensuelles ».

A ce titre, rappelons aux managers que la laïcité et la neutralité ne sont de rigueur que pour les services publics.

Si la loi Travail autorise certes les entreprises à inscrire désormais dans leur règlement intérieur un "principe de neutralité", elle précise cependant que les restrictions à la liberté de la religion ne sont possibles que si elles sont justifiées « par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux  ou  par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché ».

En d’autres termes, l’employeur doit utiliser ces nouvelles dispositions légales, pour le moins imprécises, avec la plus grande prudence…

A sa décharge, le législateur a voulu s’emparer d’un sujet embarrassant, car, pour beaucoup, il stigmatise, dans un contexte post-attentats, une seule et même religion, et se résume bien souvent à la question taboue du port du voile.

Même la Cour de Cassation n’a pas, à ce jour, clairement tranché sur cette question :

Le 9 avril 2015, elle demandait à la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) si l'interdiction de porter le foulard islamique lors de la fourniture de services de conseil informatique à des clients pouvait être considérée comme une "exigence professionnelle essentielle et déterminante".

Notons que, dans cette affaire, si la CJUE ne rendra sa décision qu’en fin d’année, l’avocat général dans ses conclusions du 13 juillet 2016, a déjà estimé que la salariée voilée avait été victime d'une discrimination directe illicite…

En attendant la décision qui, en pleine période électorale, sera certainement largement commentée, faisons confiance pour l’heure à « la réalité du terrain » :

- les employeurs, selon une étude de l’OFRE (l'Observatoire du Fait Religieux en Entreprise), déclarent majoritairement gérer le fait religieux sans difficultés majeures, car sans réelle incidence sur la bonne marche de l’entreprise.

- 77 % des salariés, pour leur part, jugent que les pratiques religieuses ne sont ni plus, ni moins visibles qu’auparavant (selon un récent sondage BVA/Club Media RH).

Rappelons enfin et surtout que le contentieux prud’homal en la matière est aujourd’hui totalement marginal !

 

Télécharger en version imprimable ici (coupure Gazette du Midi - 07/11/2016)

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